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Le Sillon Noir

19 octobre 1970

Le Sillon Noir "Mewihwendo" est un mouvement d'inculturation né au Bénin en la Journée des missions de l'année 1970 en réponse à une homélie de l'Abbé Barthélemy Adoukonou, vicaire à la Paroisse St François d'Assise de Bohicon, sur l'urgence de "donner au Christ les nations en héritage".

Ci-contre les membres fondateurs du Sillon Noir avec Mgr Isidore de Souza.

Les pionniers du Sillon Noir

La naissance du mouvement du Sillon Noir, le dimanche des missions de l'année 1970, vient en écho au Message du Pape Paul VI à Kampala, un an plus tôt : “Vous, Africains, vous êtes désormais vos propres missionnaires”. Le mouvement s’est conçu, dès le départ, comme une interpellation adressée à tout chrétien africain d’assumer ses responsabilités vis-à-vis de la culture de ses ancêtres en la faisant entrer dans l’héritage du Christ. Les premiers interpellés étaient les sages, pour la plupart convertis du culte Vodun, qui ne pensaient pas que dans leurs traditions culturelles pouvaient se trouver encore des éléments compatibles avec le message évangélique. Depuis lors, ces sages se sont résolument engagés dans une recherche conséquente sur l’ensemble de leurs traditions culturelles.

La dynamique missionnaire de l’Eglise au Bénin a cherché, dès le départ, à unir l’annonce de l’Evangile, le travail de la culture et la promotion de la personne humaine. Ainsi, le mouvement « Mewihwendo » s’est, lui aussi, engagé, dès sa naissance, dans la large vision de la culture que portait la racine du mot fon « Hwendo » (sillon des champs, culture, culte).
 
Ainsi, les sages de la tradition, qui ont adhéré au mouvement, s’investissaient sur les trois fronts de la culture :
- dans une recherche anthropologique systématique sur leur culture ancestrale dont ils apportaient les résultats chaque semaine pour une mise en commun, confrontation, discussion méthodologique et analyse ;
- aux côtés de leur Evêque, dans les travaux de la ferme diocésaine d'Agbon (au Nord du Diocèse), et dans la formation au sein des nombreux centres de promotion féminine suscités par le Père du Diocèse ;
- comme catéchistes, choristes et animateurs paroissiaux.

L’assomption de l’héritage culturel pour l’inculturation et le développement intégral de la personne humaine n’ayant d’avenir qu’en devenant intergénérationnel et interculturel, un groupe de jeunes étudiants de l’Université Nationale du Bénin a, en 1980, rejoint le groupe des sages pour aller à leur école et porter ensemble avec eux ce grand projet missionnaire. Ces jeunes ont pris le nom de « ANA » (en langue locale fon), qui signifie en français, « Pont ». Ils concevaient leur mission comme celle de construire des ponts : pont entre tradition et modernité, pont entre cultures africaines (ils étaient en effet de diverses cultures locales), pont entre l’Afrique et l’Occident ainsi qu’avec les autres cultures.

Etudiants dans diverses disciplines scientifiques, ils ont très tôt mis au point un protocole de recherche interdisciplinaire. Ce protocole s’est inspiré de la manière dont les sages travaillaient en régime d’oralité : les œuvres de culture étaient créées et la mémoire culturelle gérée d’une façon communautaire. Cette forme d’intellectualité traditionnelle a été étudiée et formalisée sous le vocable d’« intellectualité communautaire ». Le sage « intellectuel communautaire » est celui qui porte avec ses pairs la culture et les innovations culturelles.

S’étant retrouvés à Paris dans les 1985-1990 pour leurs thèses de doctorat, les jeunes membres de ANA auxquels se sont joints d’autres étudiants africains ont mûri le projet non pas de faire de leurs pays africains des "Quartiers latins" (c’était le nom qu’Emmanuel Mounier donna au Dahomey en référence à la "qualité" de ses élites intellectuelles), mais des "Quartiers de l’Intellectuel Communautaire".

C’est ainsi que retournés au Bénin, au moment critique de la fin du régime marxiste et de l’avènement du processus démocratique en Afrique, les premiers membres de ANA, avec les représentants des différentes composantes du Mewihwendo, créèrent en 1990 à Cotonou le premier Centre "Quartier de l’Intellectuel Communautaire"  (Centre Q.I.C.) et son répondant juridique : Association "Quartier de l'Intellectuel Communautaire".

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